Attaques, violations... En termes de protection, les hôpitaux sont "des véritables gruyères"

D'après les données officielles les plus récentes, plus de 34 500 individus ont été les cibles en 2021 de comportements antisociaux, d'actes de violence, de déprédations ou de larcins au sein des infrastructures de santé. Parmi eux, une prédominance de personnel, mais également des patients. De récentes incursions dans les hôpitaux ont mis en évidence des failles de sécurité alarmantes.

Sa convalescence à l'hôpital s'est transformée en un véritable enfer. Le 27 juillet dernier, une femme de plus de soixante-dix ans se remettait d'une chute au Centre de réception et de soins hospitaliers de Nanterre, dans les Hauts-de-Seine, lorsqu'elle a été attaquée et violée par un homme n'appartenant pas à l'établissement. Sa fille, arrivée peu après, n'oubliera jamais le regard de sa mère ce jour-là. "Elle semblait plus petite que jamais, épuisée et bouleversée", se rappelle Sandrine, dans le reportage du 20H de TF1 en tête de l'article. Encore choquée par le drame, elle est aussi pleine de colère.

Mi-septembre, un suspect avait été identifié. L'homme, un sans-abri, avait été mis en examen pour viol, soupçonné d'avoir agressé la victime, ainsi qu'une autre patiente, également de plus de soixante-dix ans, qu'il aurait aussi violée le même jour, à trente minutes d'intervalle. Selon Sandrine, l'agresseur s'est introduit dans l'hôpital par une sortie de secours défectueuse. Pour le démontrer, elle a fourni une vidéo tournée selon elle le jour suivant le viol, dans laquelle on voit la personne filmer ouvrir une porte vitrée sans difficulté, depuis l'extérieur, ce qui en théorie devrait être impossible.

Les membres de la famille de la victime affirment avoir identifié ce dysfonctionnement et avoir informé l'établissement quelques jours avant l'agression. "Cela me rend furieuse, parce que l'hôpital doit être un sanctuaire", insiste Sandrine. Selon l'avocate de sa mère, il n'y avait ni caméra de surveillance ni agent de sécurité dans le bâtiment lors de l'incident. L'hôpital de Nanterre a-t-il fait preuve de négligence ?

"Des portes mal verrouillées, bloquées avec des cales"

La patiente a déposé une plainte contre l'établissement et sa directrice pour mise en danger délibérée de la vie d'autrui. Une enquête a été lancée à la mi-novembre, selon le procureur de Nanterre. Le centre hospitalier a refusé les demandes d'interview de TF1 mais a transmis une brève réponse par courrier électronique : "Nous réservons nos réponses à la justice, concernant les circonstances des faits et les mesures en place au sein de l'établissement".

Suite au viol des deux patientes, l'établissement avait assuré à l'AFP avoir mis en place "des mesures supplémentaires de sécurité", notamment "un renforcement des contrôles à l'entrée de l'hôpital" et "des rondes de sécurité plus régulières". Le présumé agresseur a quant à lui été arrêté et placé en détention provisoire en attente de son procès.

La famille de la patiente n'est pas la seule à vouloir souligner le manque de sécurité dans certains hôpitaux. Dans une vidéo obtenue par le JT de TF1, un employé a également filmé son propre établissement, montrant comment il ouvrait facilement une issue de secours grillagée, depuis une cour. Au bout d'un escalier, il trouve une porte complètement ouverte, bloquée par une chaise. Cet accès est pourtant critique, car il donne sur le service de soins intensifs, selon lui.

Un infirmier chevronné n'a pas été surpris en découvrant la vidéo. "Les hôpitaux sont de véritables gruyères", déclare le professionnel de la santé, témoignant à visage couvert. En 35 ans de carrière, il prétend avoir constaté ces failles dans de nombreux hôpitaux, en raison de l'infrastructure, mais aussi à cause de négligences du personnel. "Il y a des portes mal verrouillées, ou bloquées avec des cales. Parce que c'est plus pratique, parce que c'est un petit raccourci pour récupérer les résultats au laboratoire, ou parce que le livreur qui apporte de la nourriture aux équipes le soir, et cela leur évite de descendre lui ouvrir", énumère-t-il. "C'est par facilité. En agissant ainsi, ils ne réalisent pas le danger que cela représente."

Depuis 2017, des millions d'euros ont été alloués Pour lui, la sécurisation des hôpitaux est une priorité. Des subventions sont pourtant attribuées chaque année aux établissements de santé depuis six ans. Fréquemment confronté à des intrusions et des attaques, l'hôpital d'Arles, dans les Bouches-du-Rhône, a récemment reçu une enveloppe de 200 000 euros, ce qui lui a permis entre autres d'installer de nouvelles caméras, un système de badges ainsi qu'un mécanisme de verrouillage des portes à distance, grâce à un interrupteur. "En mode jour, les portes s'ouvrent automatiquement si une présence est détectée, et en cas de danger on peut passer en mode nuit, qui verrouille ces portes", explique Emmanuel Nicolas, responsable sécurité du centre.

Moins de deux ans après avoir sécurisé son établissement, la directrice se félicite déjà de bons résultats. "On avait en moyenne plus d'une agression par mois au sein du service des urgences en 2021. En 2022, on ne compte plus que sept agressions par an, donc on a réduit de moitié leur nombre", souligne Sylvia Breton. Depuis 2017, 25 millions d'euros sont consacrés chaque année à la sécurisation des hôpitaux.

Source : Reportage TF1 Julien Cressens, Marie Belot et Erina Fourny

Retour au blog

Laisser un commentaire

Veuillez noter que les commentaires doivent être approuvés avant d'être publiés.